Interview de Petit Vodo
pour Compact - Crossroads # 19
par Francis Rateau
(mars 2004)

Crossroads : Il y avait eu une gigantesque explosion il y a peu près 4 ans, puis un dernier pétard en l'an 2000, puis plus rien, ou presque ! Où était donc passé le 'One-Man-Gang' ?
Petit Vodo : Merci pour la 'gigantesque explosion' en 1999. Le fait est que bien des choses qui me sont arrivées à cette époque me dépassaient totalement. Je suis un besogneux malgré les apparences et je n'ai jamais cru au succès immédiat. Le pétard de 2000 pour moi est le plus bruyant dans ma vie. "69 Stéreovox" (Vicious Circle, Pias) m'a donné confiance dans ma création. Un album qui a confirmé mes choix en France certes mais surtout à l'étranger. Du coup la tournée qui a suivi la sortie de ce disque a duré presque trois années. En Angleterre, en Hollande, en Belgique, en Suisse, puis a touché les Australiens... C'est sûr le propos s'était déplacé ailleurs. Les magazines étrangers n'envoient pas forcément de télégrammes à R&F, Crossroads ou aux Inrocks. C'est dingue ce nombrilisme français ! Mais le "One Man Gang" était toujours en besogne. Enfin j'ai produit d'autres artistes et ce fut une expérience magnifique que je compte bien poursuivre.

D'après la rumeur, un nouvel album furieux, va de nouveau bouleverser le monde. Le Petit Vodo dément-il cette information ?
Petit Vodo : Ce n'est pas une rumeur. Mon nouvel album verra le jour début 2004 en France. Je l'ai préparé pendant deux ans et enregistré l'été dernier prés de Bordeaux chez mes amis de Noir Désir. Je suis actuellement en mastering. Mais il ne s'agit pas de RWD "Rare and Well Done" car les deux projets, même s'ils sont liés dans ma vie créative, ne se ressemblent pas. RWD, c'est un disque pour les aficionados de mon travail. Il rassemblera une vingtaine de compositions, plus des moments rares d'enregistrements avec divers artistes en live ou à la maison, dans ma campagne landaise. J'ai prévu deux volumes. Le premier sortira très prochainement sur les disques Atomic, mon propre label. Ce sera un tirage limité sauf si une maison de disque décidait de le prendre en licence...

Pourquoi avoir délibérément caché ces perles rares ?
Petit Vodo : Parce qu'un artiste, quel qu'il soit, ne montre pas forcément ces brouillons. J'enregistre presque toutes les semaines depuis bientôt 10 ans. J'ai une haute pile de K7 DAT et de Mini Disk dans mon atelier avec beaucoup de mauvais évidemment ! 33 titres au sein de cette montagne de son, de sueur et de doutes ont touché l'artiste et producteur anglais John Parish. En hommage à la confiance qu'il m'a témoigné dans ce travail, il fallait que cela sorte.

Il y a aussi un single vinyle collector qui est proposé et un autre album à sortir courant 2004. On est soudain perdu dans les productions du Petit Vodo, d'autant que vous avez aussi créé un label : Les Disques Atomic ?
Petit Vodo : Faisons le ménage: Les disques Atomic c'est le micro label que j'ai créé pour produire mes amis et réaliser les albums "parallèles". Sur celui-ci j'ai sorti en effet un single qui était déjà sorti en 2001 uniquement pour le marché anglais, américain et japonais. Ce label, on peut dire que c'est mon laboratoire d'idées. Je me bats avec les maisons de production depuis 6 mois environs pour que sorte mon nouvel album. Normalement, on devrait le trouver en bac avant Mars.

Votre acolyte et guitariste Eric Bling a commis lui aussi un disque de blues hallucinant qui est signé par votre label. Peut-on vraiment parler de la French Touch du Blues Explosion ?
Petit Vodo : On peut le dire en effet bien que je crois que le mouvement "Nu-Blues" existe chez d'autres artistes en France. En ce qui concerne le terme "French Touch du Blues Explosion" il véhicule trop la référence Jon Spencer. Même si je voue un culte immense au JSBX et ce depuis des années et je n'ai jamais changé de cap. Eric Bling a fait une partie de ma culture blues, je lui ai donné la mienne. Son premier album est le fruit logique de cette rencontre contemporaine.

Le goût du mixage et du sample est-il aussi fort que celui de la musique elle-même? On aime manipuler les boutons ?
Petit Vodo : Dès qu'il y a de la bidouille, je sonne présent. Une vraie maladie. Genre centre d'essai de la NASA. J'ai très tôt amené cela dans ma création sonore. Ça m'amuse sur scène comme en studio.

Si la musique du Petit Vodo ressemble alors à du rock trempé dans le blues, la prestation scénique, elle, est orchestrée comme un grand one man show. La tournée 2004 verra encore ce déferlement visuel ?
Petit Vodo : Je vais aller encore plus loin avec des invités parfois sur scène, des nouveaux éléments de décors, de l'image en directe. Le tout en gardant un œil ouvert sur l'autodérision. Je ne me prends pas au sérieux. Je me souviens avoir fait la première partie en 1998 de Simple Minds dans le midi de la France. Tu vois le tableau: 8000 campeurs attendant un méga show américain sur une gigantesque scène et juste un tout petit mec qui débarque au beau milieu avec son fatras de bricolage rock and roll. Genre PAF dans vot' gueule! Je pourrais citer d'autres exemples du même genre (après Metallica aux Eurockéennes ou avant les Rita Mitsouko aux Botaniques de Bruxelles...) Chaque fois ce sentiment de nager en plein délire. Pas envie de se retrouver au sein d'un groupe, bien au chaud et couvert, comme jadis avec le Crocodile Walk!

Pour dénoncer les petits camarades (je veux des noms), quelles sont les influences du Petit Vodo et les références actuelles ?
Petit Vodo : On peut évidemment citer toute l'œuvre de Mick Taylor (des Gories), de RL Burnside et surtout de T-Model Ford chez Fat Possum. De Tom Waits, du Velvet Undexground, de T-Rex, des Cramps, du Gun Club, d'Hazil Hadkins, de Twenty Miles (le groupe de Judas Bauer), de G.Love and Special Sauce, le "One Foot in The Grave" de Beck, de Sleepy John Estes, Blind Lemon Jefferson, Lightnin' Hopkins et tant d'autes encore... Actuellement, l'album "Thickfreakness" des Blacks Keys (Fat Possum/Epitaph) tourne en boucle sur ma platine.

Au fait le Petit Vodo a-t-il remplacé sa guitare fétiche volée un soir dans les ruelles sombres de Breda en Belgique ?
Petit Vodo : Pourvu qu'elle soit tombée entre de bonnes mains, c'est tout ce que je lui souhaite... J'ai deux belles guitares aujourd'hui auxquelles je tiens, mais ma vieilles strato Skier avec la signature de T-Model Ford gravée dessus un soir de printemps 99 à Zurich, c'est irremplaçable... Pourquoi me parles-tu de cela !